“À l’image d’un process qualité, une démarche RSE se revoit et s’améliore sans cesse”
Bertrand Simon et Jacques Parent, associés au sein du cabinet Orial, nous parlent de l’importance des sujets liés à la RSE, et de la façon dont les entreprises et leurs conseillers comme les experts-comptables et les commissaires aux comptes sont amenés à s’en emparer.
“À l’image d’un process qualité, une démarche RSE se revoit et s’améliore sans cesse”
Bertrand Simon et Jacques Parent, associés au sein du cabinet Orial, nous parlent de l’importance des sujets liés à la RSE, et de la façon dont les entreprises et leurs conseillers comme les experts-comptables et les commissaires aux comptes sont amenés à s’en emparer.
Tout d’abord, comment pourrait-on définir la RSE selon vous ?
BS : C’est une bonne question parce que cela recouvre de multiples notions par nature très différentes entre elles. La difficulté de l'appréhender d’une façon unifiée comme c’est le cas pour des sujets financiers est un vrai challenge. Nous sommes aussi confrontés à une matière assez nouvelle par rapport à nos pratiques et à nos business model.
JP : Il y a à la fois des enjeux externes et des enjeux internes pour les entreprises. Les enjeux externes seront surtout centrés sur les relations clients-fournisseurs, puisqu’on aura de plus en plus de demandes de mise en avant d’une démarche RSE. Les enjeux internes concernent les jeunes générations qui entrent sur le marché du travail et font attention à la démarche RSE des entreprises qu’ils rejoignent.
Comment agissez-vous en tant que conseil pour accompagner les entreprises dans l’établissement de leur démarche RSE ?
JP : Nous avons un rôle primordial à jouer. Si nous voulons pouvoir accompagner correctement nos clients, il nous faut tout d’abord appliquer une démarche RSE au sein de notre entité.
BS : C’est la façon dont nous avons structuré notre approche pour concevoir nos offres d’accompagnement. Nous avons vraiment réfléchi et agi en ce sens. Ce que nous déployons en interne pourra ensuite être mis en œuvre chez nos clients.
Comment peut-on “mesurer” concrètement une démarche RSE ? Existe-t-il des outils ou des techniques permettant d’établir une comptabilité extra-financière ?
BS : C’est une des difficultés méthodologiques à laquelle nous devons apporter des solutions. C’est le cas pour certains sujets comme par exemple celui du bilan carbone, pour lequel nous pouvons nous appuyer sur des éléments factuels.
JP : Nos métiers se positionnent légitimement sur ce marché car nous sommes déjà habitués à manier de la donnée, soit pour produire des états, soit pour les auditer. Cela passera toutefois nécessairement par de la formation, car nous sommes sur des nouveaux champs d’investigation. Il faudra également aider nos clients à interpréter cette donnée pour en tirer une feuille de route.
BS : Nous devrons constituer un mode d’approvisionnement des données qui vont être utilisées. Nous aurons donc besoin de mettre en place un système dans lequel les données sont captées là d’où elles viennent. Ces sources de captations sont nouvelles, et nécessitent d’organiser les données chiffrées pour les exploiter, il y a donc beaucoup à faire à ce sujet.
La mise en place d’une démarche RSE est-elle naturellement évolutive ?
BS : Oui, et c’est ce qui la rend d’autant plus intéressante. La démarche RSE est dynamique dans son mode de fonctionnement : il ne s’agit pas uniquement de réaliser une photo à l’instant T et de passer à autre chose. Il faut mettre en parallèle les éléments de mesure et les éléments de trajectoire pour définir une stratégie à long terme. C’est un peu à l’image d’un process qualité, qui se revoit et s’améliore sans cesse. Par exemple dans le bilan carbone l’intérêt de la démarche n’est pas seulement de faire une photo de type "bilan » mais de se donner des objectifs d’évolution, cela fait partie intrinsèquement de la démarche, et c’est très vertueux
La vraie question qui se pose aujourd’hui c’est donc celle des flux de données, tant dans la captation que dans la restitution ?
JP : Ce sont des données qu’on ne traitait pas jusqu’à maintenant. Dans le cadre d’une démarche RSE, il y a un premier traitement qui se fait sur la base des données comptables auxquelles nous avons accès facilement. Mais si on veut aller plus loin dans cette démarche, il va falloir aller chercher des nouvelles données au sein de l’entreprise mais aussi chez ses partenaires. Prenons l’exemple d’une pièce détachée. Quelle est sa composition matière ? Où est-elle fabriquée ? Quel est le trajet qu’elle va parcourir pour arriver jusqu’à l’usine d’assemblage ? Quel est le trajet jusqu’au magasin ? Ce sont des choses que les entreprises connaissent mais qui jusque-là n’étaient soit pas mesurées, soit pas exploitées.
BS : La data devient centrale pour nos métiers, nous devons nous inscrire dans la capacité de répondre à ce besoin et de traiter ces éléments pour nos clients, qu’il s’agisse d’éléments financiers ou extra-financiers.
Existe-t-il des référentiels communs pour les données à analyser ?
JP : Pour les objectifs environnementaux, il existe une base de données de référence, celle de l’ADEME, qui est commune à tous les intervenants et mise à jour quotidiennement.
BS : Il existe d’autres éléments de référence par thématique sur lesquels nous pouvons nous baser, comme par exemple ceux de l’OIT pour les éléments liés au travail, de l’Unicef, de Transparency International, de l’INSEE, etc …
Aujourd’hui, les sujets environnementaux semblent être la principale préoccupation d’une démarche RSE. Mais dans RSE il n’y a pas que le E… La RSE va-t-elle se scinder en plusieurs branches ?
JP : L’entreprise doit voir cela comme un tout car la motivation et la considération des salariés comme des clients englobe tous les sujets, et notamment les sujets sociétaux.
BS : Aujourd’hui, le monde financier mesure des critères ESG. Et le constat qui est fait c’est que les entreprises qui ont des objectifs clairs sur ces éléments sont plus profitables et affichent des biens meilleurs résultats que celles qui ne s’en préoccupent pas. C’est pourquoi il faut envisager la RSE de façon globale et dynamique. Il y aura certainement des divisions par branche pour tout ce qui concerne l’acquisition de la data. Mais l’analyse et le pilotage dans le temps se fera de façon commune, comme c’est déjà le cas dans les grandes entreprises.
Y-a-t-il des nouveaux métiers qui vont émerger au sein de cabinets comme le vôtre ?
BS : Pas encore. Mais on se dirige vers un vrai virage, avec l’émergence de nouveaux profils qu’il va falloir attirer, des ingénieurs, ou des data scientist par exemple.
JP : Ces nouveaux métiers sont encore en construction car les formations orientées RSE sont assez récentes.