Recruter ce n’est pas si compliqué… à condition d’être bien accompagné
Comme dans de nombreux secteurs, les entreprises des métiers du chiffre connaissent des difficultés pour recruter. Hervé Puteaux, Président de JPA France, et Nathalie Charbonnier, Directrice de l’agence de recrutement Work & You à Paris, échangent à ce propos et évoquent des pistes et des solutions concrètes pour faciliter les process de recrutement des cabinets d’expertise-comptable.
Recruter ce n’est pas si compliqué… à condition d’être bien accompagné
Comme dans de nombreux secteurs, les entreprises des métiers du chiffre connaissent des difficultés pour recruter. Hervé Puteaux, Président de JPA France, et Nathalie Charbonnier, Directrice de l’agence de recrutement Work & You à Paris, échangent à ce propos et évoquent des pistes et des solutions concrètes pour faciliter les process de recrutement des cabinets d’expertise-comptable.
Le secteur de l’expertise-comptable connaît aujourd’hui, une problématique liée aux recrutements de collaborateurs. La situation a-t-elle toujours été celle-là ?
Hervé Puteaux : Non, loin de là ! Il y a eu une longue période au cours de laquelle les cabinets d’expertise-comptable, et plus encore les cabinets d’audit, recevaient des dizaines de cv par mois, voire même de manière hebdomadaire. Même si cette tendance était déjà présente, la problématique du turnover s’est très largement amplifiée avec la crise sanitaire. Ce n’est d’ailleurs pas spécifique à la France, il s’agit d’une tendance mondiale.
Autant de raisons qui poussent des cabinets à faire appel aux services d’un cabinet de recrutement comme Work & You Paris ?
Nathalie Charbonnier : Nous travaillons avec plusieurs cabinets d’expertise-comptable, et l’une des principales problématiques qu’ils rencontrent c’est de trouver des candidats qualifiés. Il y a donc un gros travail de tri et de sélection à faire pour ces postes-là.
Pourtant, il y a beaucoup d’offres d’emploi sur le marché pour les métiers du chiffre. Mais peu de candidats y répondent… Pourquoi ?
HP : Par définition, les dirigeants de cabinets ne sont pas des spécialistes RH. Jamais personne n’a été formé à faire du recrutement, nous étions plutôt habitués à disposer de CV qui nous parvenaient facilement… Par ailleurs, même s’il y a toujours eu du turnover, il était relativement faible. Les cabinets structurés gardaient leurs collaborateurs pendant un certain temps. On se retrouve ainsi face à une situation à laquelle nous sommes confrontés, sans savoir la gérer… Dans ce contexte, quand la problématique du recrutement devient plus complexe et sophistiquée, c’est important d’être accompagné dans nos recherches, pour bien formuler nos attentes. Mais aussi pour nous rendre attractifs auprès de potentiels candidats.
NC : La question de l’attractivité est centrale aujourd’hui ! Je le vois régulièrement au travers des échanges que je peux avoir au quotidien. Le métier souffre d’un déficit d’image, il est peu attractif. Pourtant c’est un métier tourné vers l’avenir, qui a considérablement évolué ces dernières années. Pour attirer des jeunes dans ces filières, il faut leur parler de ces évolutions, leur parler des outils numériques utilisés dans les cabinets. Mais aussi casser les clichés liés à la profession.
Travailler dans un cabinet c’est être tourné vers ses clients, échanger très fréquemment avec eux, leur fournir des conseils. Autant de choses que nous mettons en avant sur nos annonces pour inciter les candidats à venir vers nous.
L’attractivité ce n’est donc pas uniquement une question salariale. C’est aussi la façon dont on « vend » le métier aux futurs collaborateurs…
NC : C’est très juste. Il faut bien sûr susciter l’intérêt d’un candidat mais également être en capacité de l’embarquer. Concrètement, le poste proposé doit comporter des éléments attractifs qui permettront de l’emmener dans le processus de recrutement. Il ne s’agit pas simplement de transférer un cv, mais de proposer un candidat qui corresponde au cabinet qui nous mandate. Un recrutement réussi c’est un candidat motivé par le projet professionnel proposé et aligné avec les valeurs de l’entreprise. Cela suppose de mettre en œuvre certaines techniques auxquelles nous sommes formées.
HP : Des techniques qui ne sont pas innées chez nous ! Avant de se lamenter sur les difficultés de recrutement, il y a une question fondamentale que nous devons nous poser : « que vend-t-on à un candidat ? ». Nous devons apprendre à mieux parler de nos métiers : leurs qualités, les perspectives d’évolutions… Il ne faut pas négliger non plus les questions sociétales et expliquer à quoi nous servons au quotidien ainsi que les relations privilégiées que nous entretenons avec nos clients.
Vendre le métier aux candidats, c’est là toute la valeur ajoutée d’un cabinet de recrutement ?
NC : Effectivement. La perspective de faire évoluer son salaire doit faire partie des motivations, mais ce ne doit pas être la seule. Nous sommes là pour nous en assurer et dénicher des candidats en réelle adéquation avec le projet proposé par le cabinet. J’insiste sur ce point car les projets peuvent être très divers : développement du cabinet, développement de la carrière du candidat… Il est indispensable de présenter un projet concret à un candidat, qui souvent est déjà en poste. Il faut que lui donner des éléments pour qui l’aideront à prendre une décision.
Le fait d’être accompagné par un cabinet de recrutement ouvre-t-il des perspectives nouvelles dans la typologie des candidats susceptibles de rejoindre une entité des métiers du chiffre ?
HP : Cela dépend bien évidemment des métiers, mais clairement, la réponse est oui. Aujourd’hui par exemple, la dimension technologique est essentielle dans nos métiers. Je ne suis pas convaincu que les cursus actuels de formation aux métiers de la comptabilité dispensent véritablement les compétences appropriées pour ces sujets-là, du moins au niveau pratique. Mieux vaut donc un candidat un peu dégourdi, qui a une appétence pour utiliser des outils technologiques, plutôt qu’un autre qui ne sera que dans la comptabilité au sens normatif du terme.
NC : Et comme nous travaillons également pour d’autres secteurs d’activité, nous sommes susceptibles de dénicher des profils différents qui pourraient passer hors des radars des cabinets d’expertise-comptable ou des cabinets d’audit. Malheureusement certains cabinets sont frileux sur ce sujet, et restent dans un périmètre plus restreint qui complexifie d’autant plus leur recrutement. En période de pénurie, il est préférable de s’ouvrir à de nouveaux profils, qui vont d’ailleurs souvent enrichir les équipes en place.
HP : Encore trop souvent, les experts-comptables sont enfermés dans l’image de la production de comptes. En réalité, tous les services les plus intéressants et porteurs de valeur ajoutée, sur lesquels souhaitent se positionner de nombreux cabinets, demandent de faire appel à des profils plus variés. Pour délivrer des services tels que le contrôle interne, l’évaluation d’entreprises, le contrôle de gestion, la transmission, la succession, l’organisation juridico-fiscale de l’environnement d’un entrepreneur, ou bien encore pour tout ce qui touche aux sujets extra-financiers comme la RSE, nous avons besoin de profils qui, souvent, sont recrutés par des cabinets de conseils…
Dénicher les bons profils, qui pour certains ne candidatent pas forcément naturellement auprès des cabinets d’expertise-comptable, demande donc d’y consacrer du temps…
NC : Oui, et c’est parfois un travail de fourmi. Par exemple quand nous avons accompagné JPA pour deux recrutements récents, nous avons fait le tri parmi 600 CV pour ne nous attarder que sur ceux qui étaient raccords avec les valeurs de l’entreprise. Notre objectif est de proposer des candidats qui « matchent » avec l’entreprise. Un cabinet n’a pas forcément le temps pour réaliser ce travail de sélection. Comme je n’ai pas forcément le temps, ni les compétences suffisantes d’ailleurs, pour réaliser ma comptabilité moi-même ! À chacun son métier.
HP : Je vois encore trop de confrères et consœurs qui hésitent à passer par un cabinet de recrutement en mettant en avant l’argument financier. Pourtant, ne pas trouver un ou plusieurs collaborateurs quand on en a besoin a également un coût certain… J’entends également que certains cabinets chassent des candidats qu’ils ont placé précédemment. Mais pour moi, si l’on ne propose pas un projet qui donne envie à un collaborateur de rester, j’ai tendance à penser qu’il partira quoi qu’il arrive.
NC : Je tiens à ajouter un point important : Work&You ne pratique absolument pas la chasse de candidats déjà placés. Cela fait partie de nos engagements auprès de nos clients et de nos valeurs.